Ignorance volontaire et savoir empathique en Chine contemporaine : Désaccords dans la relation d’enquête après l’incendie de Daxing (2017)
Conférence de Lisa Richaud, docteure en anthropologie à l'Université libre de Bruxelles en Belgique et chercheuse-résidente en 2025-2026 à l'IEA de Paris dans le cadre du séminaire « Humains et Humanité » à destination des masters 1 et 2 au département d'anthropologie dirigés par le professeur Albert Piette à l'Université Paris Nanterre.
Cours en français. Uniquement en présentiel.
Présentation
S’inscrivant dans le cadre du cours « Humains et Humanité » du Master d’Anthropologie de l’Université de Nanterre (titulaire : Albert Piette), cette intervention se penchera sur les phénomènes, tant affectifs que cognitifs, d’ignorance volontaire – et les processus connexes tels que crédulité et incrédulité, scepticisme, incroyance… - tels qu’ils peuvent se déployer face à la violence d’Etat. La thématique sera traitée à partir d’un matériau ethnographique recueilli lors d’une enquête menée à Shanghai en 2017-2018 auprès de travailleur.se.s migrants ruraux, dans un contexte où discours officiels et politiques de « développement urbain » ont relégué les populations migrantes au rang de « populations bas-de-gamme (diduan renkou) ». Comment comprendre que certains se détachent de cette réalité, et que signifie pour l’ethnographe la prise en compte, dans la relation d’enquête, de ce détachement ?
La question de l’ignorance n’est pas nouvelle en sciences sociales : elle s’est imposée ces dernières années comme objet de recherche, tant en anthropologie que dans les études chinoises, en particulier pour les formes d’auto-préservation, mais aussi d’agencéité dont elle peut contre-intuitivement être porteuse pour des sujets en situation de vulnérabilité. Il s’agira de questionner le paradoxe inhérent à l’ignorance volontaire, en particulier lorsqu’elle se déploie dans le cadre de la relation entre l’ethnographe et l’un de ses interlocuteurs.
Une situation spécifique sera au centre de l’analyse. En 2017, un violent incendie se déclara sans l’un des villages urbains de la banlieue sud de Pékin. Majoritairement habitée par des travailleurs migrants ruraux, la zone fut l’objet d’une vaste campagne d’éviction, amplifiant les conséquences de l’incendie meurtrier pour des individus déjà fortement précarisés. Si des citoyens engagés ont pu déployer diverses stratégies d’activisme pour documenter ces circonstances en évitant la censure, les images des départs en masse ont pu faire l’objet de réappropriations et détournements à d’autres fins sur les réseaux sociaux. L’intervention a pour point de départ la réception de ces images détournées par l’un de mes interlocuteurs, et sur l’incrédulité affichée par ce dernier face aux évictions. Nous interrogerons les relations entre ignorance volontaire, savoir empathique, et (in)justice affective.
Plus d'informations : https://www.parisnanterre.fr/
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