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Quelle place pour les femmes dans l'espace public ?

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Marylène Lieber, "Quelle place pour les femmes dans l'espace public ?", The Conversation, 14 mai 2019 [En ligne]
Consulté le 14 mai 2019, URL : http://theconversation.com/quelle-place-pour-les-femmes-dans-lespace-public-116531


Extrait


Les femmes peuvent elle occuper l’espace public comme le font les hommes ? L’espace public est-il véritablement ouvert à toutes et à tous ? Et quelles sont les expériences qu’en font les femmes ? Telles sont les questions qu’abordent une déambulation artistique et collective, nommée Public·ques !, une expérience sensible qui questionne l’égalité des sexes dans les espaces publics et qui aura lieu le 18 mai prochain à l’IEA de Paris, dès 17h30.

Cette déambulation artistique est le fruit de la rencontre entre la chorégraphe Annick Charlot, le metteur en scène multimédia Pierre Amoudruz, et moi-même, sociologue. Elle repose sur un procédé d’écriture chorégraphique et sonore qui invite les spectateur·trices, en connivence avec une vingtaine de complices, à interroger leur relation à l’espace, tout comme à éprouver, voire détourner les spécificités qui pèsent sur les corps féminins.

Ce projet est inspiré des enquêtes issues des sciences sociales, et plus particulièrement de mes travaux qui se sont attachés à déconstruire l’association faite entre espaces publics, féminité et danger, et à souligner la construction sociale qui entoure la notion de vulnérabilité des corps féminin. Un tel dialogue entre démarche artistique et recherche en sciences sociales permet de favoriser autant la création artistique que les nouvelles formes de diffusion des travaux académiques.


La légitimité des femmes dans les espaces publics

Parler de genre et d’espace public c’est poser la question de la place légitime des unes et des autres dans les espaces publics, ce que des géographes ont appelé le droit à la ville.

Cette question a d’ailleurs déjà fait l’objet de revendications, dès le XIXème siècle en Angleterre. A l’époque, les femmes de classes supérieures entendaient pouvoir sortir et consommer sans être interpellées et considérées comme des femmes faciles. Ce sera ensuite un enjeu en France tout au long des années 1970-1980, notamment autour des débats sur la législation sur le viol. Les revendications récentes montrent que ce qui a longtemps paru acceptable, comme des remarques, des attouchements, n’est désormais plus tolérable.

(...)


Des pratiques différenciées de la ville

Comme l’avait déjà montré l’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff), ces atteintes généralement considérées les moins graves ont des conséquences significatives sur les pratique des femmes dans les espaces publics.

Qu’elles se présentent ou pas comme craintives, les femmes, toutes origines confondues mettent en œuvre des précautions – réfléchir à sa tenue en fonction de l’heure où on va rentrer, éviter telle ou telle rue, tel café etc – qui participent de la reproduction de la ségrégation sexuée et de l’idée selon laquelle les femmes ne sont tolérées dans les espaces publics que dans certaines circonstances (la journée pour faire ses courses ou amener ses enfants).

Les critiques portées par les recherches féministes insistent alors sur la nécessité de mieux intégrer les expériences féminines dans la fabrique de la ville, notamment en prenant en considération les pratiques différenciées.

Intégrer une perspective de genre favoriserait ainsi une meilleure inclusion de la diversité des pratiques et des usages des espaces publics.


Partager l’espace public ?

Aujourd’hui, on est passé d’une réflexion centrée sur les violences interpersonnelles, en termes de sécurité, vers une réflexion plus large sur le genre et la ville, qui intègre également des questions sur l’environnement construit ; on discute plus largement du droit à la ville des hommes et des femmes.

C’est cette évolution que Public.ques questionne, via une « déambulation artistique et sonore » : une balade à la fois introspective, collective, chorégraphiée et connectée pour éprouver ensemble les inégales libertés des femmes et des hommes. Ainsi, aux réflexions sur les entraves que connaissent les femmes dans les espaces publics, la déambulation ajoute des interrogations sur la façon dont les usages des espaces reflètent la division sexuée du travail. De même, elle considère les espaces publics comme lieu de contestations, de revendications ou de négociation des questions liées aux inégalités entre les sexes.

Lire l'article (TheConversation.com)

 


Pour aller plus loin :

Lieber Marylène (2018). « Les femmes et le partage des espaces publics : pour la mixité », Terra Nova, [En ligne], URL : http://tnova.fr/notes/les-femmes-et-le-partage-des-espaces-publics- pour-la-mixite.

Lieber Marylène (2015). « Les violences de genre dans l’espace public », Revue Reiso, 8 octobre, [En ligne], URL : http://www.reiso.org/spip.php?article5360

Lieber Marylène (2008). Genre, violences et espaces publics : la vulnérabilité des femmes en question, Paris : Presses de Sciences Po.

Condon Stéphanie, Lieber Marylène, Maillochon Florence (2005). « Insécurité dans les espaces publics : comprendre les peurs féminines », Revue française de sociologie, vol. 46, no 2, pp. 265- 294.

Lieber Marylène (2002). « Le sentiment d'insécurité des femmes dans l'espace public : une entrave à la citoyenneté ? », Nouvelles questions féministes, vol. 21, no 1, pp. 41-56.

Qui doit être protégé dans la rue ? Les réglementations contrastées sur la présence des femmes dans l’espace public
01 septembre 2018 - 30 juin 2019
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Sociologie
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